Un point de vue développé dans la revue La pensée écologique, coordonnée par Dominique Bourg.
Reconnaître le crime d’écocide pour faire face à l’effondrement. Valérie Cabanes
Vol 1 (1) – octobre 2017
Depuis 2012, des peuples autochtones du continent africain, préoccupés par l’état de santé détérioré de la planète et l’avenir de nos enfants, indignés par toutes les destructions que l’industrialisation fait subir à la nature et en l’absence de cadre contraignant l’activité humaine au respect des limites planétaires connues, ont travaillé à la rédaction d’une déclaration présentée en 2015 et nommée : Déclaration des communautés gardiennes africaines. Cette déclaration se présente comme un appel à l’action auprès de la Commission africaine, chargée de faire appliquer la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, pour la reconnaissance et la protection des sites naturels et des territoires sacrés ainsi que des systèmes de gouvernance coutumiers en Afrique. L’appel, inspiré par les recommandations d’un rapport de 2012 sur le même sujet au Kenya, propose de placer la Terre comme référence ultime pour toute forme de vie ou d’activité sur la planète et de la reconnaître comme pivot du Droit. Ainsi, grâce à un continuel plaidoyer, dans des pays comme l’Afrique du Sud, l’Éthiopie, l’Ouganda, le Kenya, le Bénin, le Ghana, des écosystèmes comme des chutes d’eau, des rivières, des forêts, des montagnes, des lacs ont été reconnus comme des sites sacrés et ont pu être protégés de l’exploitation industrielle en leur donnant par exemple le statut de réserve de biosphère par l’Unesco.
Cette démarche est à l’œuvre partout dans le monde. Des peuples autochtones, habitants originaux des continents du monde, revendiquent la protection de sites naturels qu’ils considèrent comme sacrés. Malgré le fait que ces populations possèdent différentes cosmologies et différents symboles, elles tirent leurs lois et leurs coutumes d’une vérité centrale considérant la Terre comme « la mère de toute forme de vie » et comme une entité légitime et ordonnée. Ces traditions révèrent leurs terres ancestrales car elles constituent la source primaire du sens de la vie et de toute identité. Quand elles sont maintenues, la connaissance et la sagesse du droit ancien sont transmises par les ainés, des hommes et des femmes sages responsables de la pratique des rituels de la terre, de la médiation avec les ancêtres, de la transmission de leurs connaissances aux générations suivantes. Les sites naturels sacrés sont des territoires d’importance écologique, culturelle et spirituelle, intégrés dans les terres ancestrales. Pour eux, un territoire comprend les plantes, les animaux, les esprits des anciens, toute forme de vie sur terre, y compris les humains, et atteint les profondeurs de la terre, dont le sous-sol et plus loin, les roches et les minéraux ainsi que les hauteurs du ciel jusqu’aux constellations célestes. Leur rôle et leur signification leur sont irremplaçables. Ce sont des centres de connaissances et d’apprentissage intergénérationnel, et c’est ainsi qu’elles deviennent des sources de droit. Les systèmes de gouvernance coutumiers sont en effet fondés sur la relation que ces peuples entretiennent avec ces lieux. Leurs lois coutumières découlent ainsi des lois de la Terre et ils se considèrent comme garants de leur application.
La suite ici en accès et téléchargement libre : http://lapenseeecologique.com/reconnaitre-le-crime-decocide-pour-faire-face-a-leffondrement/
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