A l’occasion de la Journée de la Terre nourricière ce dimanche 22 avril 2018, redécouvrez cette interview parue en janvier dernier dans notre hors-série GEO sur les héros qui changent le monde.
Propos recueillis par Laure Dubesset-Chatelain / GEO – Jeudi 19 avril 2018
Extraits:
De quelle façon plaidez-vous cette cause ?
On dispose d’un outil extraordinaire : les limites planétaires (les seuils à ne pas franchir, sous peine de bouleverser nos écosystèmes, reconnus par les Nations unies). Elles s’appliquent à neuf domaines, dont le réchauffement climatique, la biodiversité ou l’acidification des océans. Sur cette base, en 2015, on a donc proposé dix-sept amendements au Statut de Rome, traité fondateur de la CPI. Ils définissent ce qu’est un écocide, mais ils expliquent aussi aux juges sur quelles expertises scientifiques s’appuyer pour déterminer quand un projet industriel est dangereux et idéalement mettre en place une justice préventive.
Comment ces propositions ont-elles été reçues ?
La CPI ne peut d’elle-même entériner un amendement. Il faut qu’un Etat, ou une coalition d’Etats, l’inscrive à son agenda. On ne mise pas trop sur les grands pays industrialisés, préoccupés par leurs intérêts économiques, mais plutôt sur les pays africains ou des nations du Pacifique, très exposées au changement climatique. En attendant, la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, a proposé d’élargir le crime contre l’humanité aux cas de crimes contre l’environnement et à l’accaparement des terres. On est donc plutôt confiants !
Vous devez aussi être confortée par les décisions de certains Etats.
Je suis la première étonnée de voir à quel point ça avance. Les précurseurs étaient l’Equateur, qui a inscrit le droit de la nature dans sa Constitution en 2008, et la Bolivie, en 2009. Depuis 2017, ça s’est accéléré. En Inde, par exemple, une cour a donné des droits au Gange, à son affluent et aux écosystèmes himalayens. Je participe, en ce moment, à une initiative au sein de l’ONU qui compile toutes les jurisprudences existantes.
Est-ce alors encore la peine de s’adresser à la CPI ?
Oui, car ces initiatives sont capitales mais insuffisantes. Il n’existe aucun moyen, à l’échelle internationale, pour défendre la planète contre les dégradations. Les compétences des juridictions locales ou nationales s’arrêtent aux frontières. Alors que les écosystèmes, comme les responsables des destructions, sont transnationaux.
>>> Interview tirée du hors-série consacré aux Héros qui changent le monde, paru en janvier 2018.
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