La construction du barrage géant de Belo Monte montre que onze ans après son entrée en vigueur au Brésil, la convention de l’OIT sur les peuples indigènes n’est toujours pas respectée. Le texte prévoit leur consultation avant des grands travaux de ce type. Gouvernement et syndicats, qui pourraient faire avancer le dossier, traînent des pieds. | |||
En voie d’achèvement, le barrage de Belo Monte constitue le cas le plus emblématique de non-respect de la convention sur les droits des peuples indigènes. Troisième plus grand barrage du monde, l’ouvrage de 10 milliards d’euros est en construction depuis 2012, par le consortium Norte Energia, détenu à 49,98% par le groupe public Eletrobras. Il doit progressivement entrer en service ente 2015 et 2019 pour délivrer une puissance de 11 233 mégawatts. Mais il menace le territoire de milliers d’Indiens et de riverains. Pourtant, « la population est très mal informée des conséquences du projet sur son territoire », souligne la juriste. « Un document de 20 000 pages leur a été remis trois jours avant la consultation, non traduit en langue vernaculaire », illustre-t-elle.
« Les Indiens ont le droit d’être consultés avant la construction de ce barrage parce que cela bouleverse leur vie », résume Felicio Portes, procureur du ministère public de l’Etat du Para, qui suit le dossier depuis sept ans. 277 espèces endémiques de poissons disparaîtront avec la perte du fleuve Xingu, « noyé » sous le réservoir du barrage, quand nombre de ces riverains vivent de la pêche. La convention de l’OIT leur donne « un droit d’atténuation du projet et un droit à l’indemnisation », explique-t-il. Des montants de 900 millions à 1,5 milliard d’euros d’indemnisation sont évoqués. « Où l’argent va-t-il atterrir ? Combien ira aux Indiens, sous quelle forme et pour compenser quoi ? Ce n’est pas clair ! »
Violation des principes de l’OIT Pourtant le Brésil a ratifié en 2002, la convention 169 de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux mais elle n’est toujours pas mise en application dans le pays. Le texte légalement contraignant « stipule que toute activité sur un territoire autochtone doit être précédée d’une information et d’une consultation préalables de ces peuples », rappelle Valérie Cabanes, juriste en droit international, conseillère juridique pour Planet Amazon. Une plainte pour non-respect d’une convention de l’OIT ne peut être déposée que par les syndicats du pays concerné, ou par les membres du comité d’administration de l’organisation internationale, rappelle Valérie Cabanes. Aucun des deux principaux syndicaux brésiliens – la Centrale unique des travailleurs (CUT) et Força sindical, dont la représentativité respective est de 35,6% et 13,82% – n’envisage de le faire. « Il ne faut pas créer n’importe quel emploi à n’importe quel coût », concède Jasseir Fernandes, secrétaire à l’environnement de la CUT, qui a organisé plusieurs rencontres avec les Indiens. Mais le barrage de Belo Monte ne figure pas à l’agenda environnemental 2014 du syndicat, qui attend désormais une nouvelle réunion organisée par le gouvernement.
Le travail d’abord, l’environnement ensuite
Le syndicat des ouvriers des industries de la construction lourde de l’Etat du Para (Sintrapav) a fait sienne la maxime de Voltaire : « Le travail éloigne de nous trois grands maux : l’ennui, le vice et le besoin », nous déclame Heriton Pantoja, du service communication du syndicat. Affilié à Força sindical, le syndicat est « favorable à l’usine hydroélectrique de Belo Monte », « au nom des travailleurs » de cet Etat, qu’il représente, affirme-t-il.
« La situation est tragique », conclut Felicio Portes. Alors que les travaux continuent, « rien n’est respecté. Cela donne le sentiment qu’il n’y a pas de loi au Brésil, pas d’action du gouvernement, seulement la présence des grandes entreprises ». Quant à l’action syndicale, « historiquement, la CUT a joué un rôle très important contre le régime dictatorial militaire ici au Brésil », mis en place il y a 50 ans. « Il faut reconnaître cela, mais on ne voit plus cet engagement-là de la CUT dans les luttes sociales autour de Belo Monte. » |
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Victor Roux-Goeken, à Rio de Janeiro © 2014 Novethic – Tous droits réservés |
Mon discours le 15 novembre 2013 lors de la manifestation citoyenne à Paris contre le barrage de Belo Monte en Amazonie brésilienne.
Comment discipliner les multinationales qui s’accaparent les ressources de la Planète et menacent les fondements du Vivant en détruisant les écosystèmes dont l’Humanité dépend ? Aujourd’hui le droit international est incapable de protéger correctement l’avenir des générations futures. Les citoyens européens proposent une solution sur http://endecocide.eu
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Rien à Voir : un magazine de la rédaction d’Alternantes, émission proposée par Michel Sourget:
Je marche en compagnie de Michel Sourget dans les rues de Nantes lors du 5ème Forum mondial des droits de l’Homme afin d’éclairer sur ma démarche et de comprendre à quel carburant je fonctionne.
Avec les témoignages d’Hubert Reeves et de Pierre Rabhi sur l’état de notre planète. Et les commentaires de la population.
Le peuple Innu, en forêt boréale québécoise sur un territoire ancestral qu’ils nomment le Nitassinan, doit faire face aux velléités énergivores des gouvernements du Québec et du Canada.
L’un des projets du Plan Nord, programme de développement économique des régions nordiques du Québec annoncé en mai 2011, inclut la construction d’un grand barrage hydroélectrique sur la rivière la Romaine, une des dernières grandes rivières sauvages encore préservées.
J’ai dénoncé ce projet de barrage dès 2008 lors de la période de concertation entre Hydro-Québec et les Innus, constatant un manque flagrant de données dans les études d’impact ainsi qu’un manque d’informations apportées aux populations autochtones afin que leur consentement soit éclairé.
Je suis intervenue lors d’un colloque au CIERA à Québec lors d’une intervention titrée :
« Peut-on vouloir une autonomie gouvernementale tout en cédant son assise territoriale? Le cas de la communauté innue d’Ekuanitshit au Québec » – le 17 avril 2008 à Québec:
Intervention au colloque du CIERA
J’ai en particulier fait mes recherches entre 2007 et 2009 au sein de la communauté d’Ekuanitshit (Mingan) qui devait se prononcer sur ce projet de barrage menaçant leurs territoires traditionnels de chasse et de pêche et voué à perturber la quiétude de la communauté le long de la route 138.
J’ai recueilli la parole des aînés avec le juriste Jean-Paul Lacasse qui a fait l’objet d’un chapitre dans ce beau livre dirigé par Mathieu d’Avignon et Camille Girard aux éditions PUL :
Livre " A-t-on oublié que jadis nous étions frères"
J’y ai aussi rencontré Rita Mestokosho, poétesse innu, devenue aujourd’hui Vice-Chef de la communauté d’Ekuanitshit. Nous avons travaillé ensemble à une déclaration publique lors des audiences publiques avec Hydro-Québec. Voici son discours :
Ma mémoire est la vôtre – Rita Mestokosho
A l’époque, il n’a pas été évident de départager la communauté sur le sujet. Certains étaient inquiets des conséquences écologiques, humaines et culturelles de ce méga-projet, d’autres espéraient sortir d’un assistanat gouvernemental humiliant grâce aux retombées économiques promises en termes d’emploi et de redevances.
Aujourd’hui, les Innus sont déçus et se mobilisent activement à travers les médias, les réseaux sociaux et la concertation des Chefs.
J’ai publié en 2009 plusieurs articles dans les revues d’associations engagées comme Survival International, ICRA, CSIA-Nitassinan :
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