Le 5 juin 2018 – Hôtel de Ville de Metz
Echanges croisés avec Ernst Zürcher, ingénieur forestier, professeur spécialiste de la structure temporelle des arbres, intervenant du film « l’intelligence des arbres » et auteur du livre « Les arbres, entre visible et invisible » chez Acte Sud. Conférence proposée par l’institut européen d’écologie, en partenariat avec « la voix de l’Arbre » et le collectif « Foret du Val de Metz »
C’est un phénomène mondial ! Face à l’inaction des politiques pour enrayer les changements climatiques : un recours prend de l’ampleur et il est juridique. Des familles et des municipalités portent désormais plainte contre des Etats et des multinationales.
Zoom sur la 15ème édition du Forum international de la météo et du climat et son colloque Financer la transition vers une société bas carbone avec Anne Girault, directrice de l’agence parisienne du climat et Benoît Leguet, directeur général d’I4CE.
Ils n’ont pas fait Mai 68. Cinquante ans plus tard, ils vont faire 2018. Chaque jeudi, Franceinfo met en avant un combat, un visage, une voix. Au Pérou, Saúl Luciano Lliuya tente de sauver la cordillère des Andes en s’attaquant à la multinationale RWE. Je commente sur France Info cet évènement le 22 mars 2018, jour de commémoration du lancement du mouvement de mai 68.
A noter le 22 mai 2018 à 19h au studio 104:
Franceinfo organise « Sous les pavés 2018 », un évènement autour des nouveaux combats de l’émancipation et des libertés, au studio 104 de la Maison de la radio où j’interviendrai en compagnie d’Irène Frachon, entre autres. Réservations sur maisondelaradio.fr
Le projet d’intégrer le respect des limites planétaires dans la constitution s’inscrit dans une dynamique mondiale visant à appréhender l’interdépendance des enjeux environnementaux. Pour ce faire, Ban Ki-moon évoque dès l’Assemblée générale de 2011 les limites planétaires comme outil de mesure scientifique. S’adressant aux dirigeants du monde, il déclare « Aidez-nous à défendre la science qui montre que nous déstabilisons notre climat et dépassons les limites planétaires à un degré périlleux ». Le Panel de haut niveau de l’ONU sur la viabilité du développement mondial (UN High-Panel Level on Sustainability) inclut la notion de limites planétaires (planetary boundaries) dans son texte de présentation (2012). Le « Rapport sur l’Etat de l’environnement » de l’Agence européenne pour l’environnement rendu en 2010 hisse les limites planétaires au rang de « priorité environnementale ». La Commission européenne exploite ce concept en 2011 afin de définir ses objectifs : « D’ici à 2050, l’économie de l’UE aura crû de façon à respecter les contraintes de ressources et les limites planétaires ».
Nous proposons d’ajouter à l’Article 1 de la Constitution française : « La République veille à un usage économe et équitable des ressources. Elle garantit aux générations présentes et futures un environnement sain et sûr en veillant au respect des limites planétaires, à savoir les grands équilibres interdépendants qui conditionnent l’habitabilité de la Terre ».
Le travail n’est pas fini car d’autres propositions constitutionnelles vont être portées par un collectif d’ONGs dont Notre affaire à tous.
Qu’est-ce que les limites planétaires ?
La notion des limites planétaires relève d’une démarche scientifique. Neuf processus et systèmes régulent la stabilité et la résilience du système terrestre – les interactions de la terre, de l’océan, de l’atmosphère et de la vie qui, ensemble, fournissent les conditions d’existence dont dépendent nos sociétés. Des seuils à ne pas dépasser sont définis pour chacun d’entre eux sous peine de perdre la stabilité du système et donc l’hospitalité de la Terre :
le changement climatique ;
les pertes de biodiversité ;
les perturbations globales du cycle de l’azote et du phosphore ;
l’usage des sols ;
l’acidification des océans ;
la déplétion de la couche d’ozone ;
les aérosols atmosphériques
l’usage de l’eau douce ;
la pollution chimique (plus largement l’introduction d’entités nouvelles dans la biosphère).
Pour ma part, je propose que ces seuils soient chiffrés et inscrits dans la loi pour que l’instruction judiciaire puisse s’appuyer sur ces données scientifiques établies par le Stockolm Resilience Center. Des valeurs seuils ont été définies pour sept d’entre elles. Lorsqu’une limite ne peut donner lieu à un seuil chiffré sur le plan global, cela reste possible sur un plan régional ou donner lieu à la définition de seuils par composants, par exemple par polluant :
1 Le changement climatique :
Seuil à 350 ppm de CO2 dans l’atmosphère pour rester en deçà de 2° d’ici à 2100,
Changement du forçage radiatif global depuis l’époque pré-industrielle (en watts par mètre au carré) +1 W/m2 max / actuellement +2,88 W/m2.
2 L’érosion de la biodiversité: le taux d’extinction « normal » des espèces doit rester inférieur à 10 espèces par an sur un million.
3 Les apports d’azote et de phosphore à la biosphère et aux océans (résultant notamment de l’agriculture et de l’élevage intensifs) :
N(azote)= Limiter la fixation industrielle et agricole de N2 à 35 Mt/an, soit environ 25% de la quantité totale de N2 fixée par an naturellement par les écosystèmes terrestres.
P (phosphore) : < 10× = limite de flux de phosphore vers l’océan ne dépassant pas 10 fois celui de son altération naturelle au fond de l’Océan.
4 Le changement d’usage des sols : Pourcentage de la couverture terrestre mondiale convertie en terres cultivées = ≤ 15% de la surface terrestre libre de glace convertie en terres cultivées.
5 L’acidification des océans : Concentration en ions carbonates par rapport à l’état moyen de saturation de l’aragonite dans les eaux de surface des océans (Ωarag) = ≥ 80% par rapport à l’état de saturation moyen préindustriel, y compris la variabilité saisonnière naturelle et saisonnière.
6 L’appauvrissement de l’ozone stratosphérique : Concentration d’O3 stratosphérique, DU = <5% de réduction par rapport au niveau préindustriel de 290 UA.
7 L’usage de l’eau douce : Consommation d’eau bleue / km3 / an sur Terre = < 4,000 km3/an
8 La dispersion d’aérosols atmosphériques : Concentration globale de particules dans l’atmosphère, sur une base régionale.
9 La pollution chimique (composés radioactifs, métaux lourds, composés organiques synthétiques tels que pesticides, produits et sous-produits chimiques industriels à longue durée de vie et migrant dans les sols et l’eau parfois sur de très longues distances), y compris l’introduction d’entités nouvelles dans la biosphère comme les nanoparticules et molécules de synthèse.
Les limites planétaires sont l’outil qui permettrait à terme de reconnaître le crime d’écocide dans le droit pénal français.
Durée émission : 25 min présentée par Béatrice Soltner
Interview de Valérie Cabanes, juriste auteur d’ « Un nouveau droit pour la terre » ed.Seuil et « Homo natura » ed.Buchet-Chastel.
Forêt rasée, océan pollué, air vicié, la terre souffre et nous voici plongé dans l’anthropocène, spectateur sidéré, vivant une ère inédite où pour la première fois de son histoire l’homme s’empoisonne à mort en assassinant son milieu nourricier.
Les dommages sont tels que des voix réclament la reconnaissance internationale du crime d’écocide, ce fut le cas par exemple en mai 2016 lorsque le Tribunal international contre Monsanto affirmait que les activités de la multinationale causaient des dommages aux sols, à l’eau et à l’environnement. Les 5 juges concluaient que les faits rapportés pourraient relever de la Cour pénale internationale.
En France et dans le monde, des associations et citoyens militent pour la reconnaissance de la responsabilité juridique des États dans le changement climatique.
(…) En 2017, les investissements dans les énergies fossiles de la part des États notamment restent colossaux. « Aujourd’hui, nous sommes face à des entreprises, des États et des banques qui, en connaissant les conséquences de leurs actes, continuent à subventionner ou à exploiter des énergies fossiles », explique Valérie Cabanes, auteure d’Un nouveau Droit pour la Terre et cofondatrice de l’association « Notre affaire à Tous». Face à cette situation, la juriste internationale milite pour la reconnaissance de la responsabilité juridique des États grâce notamment à la prise en compte du crime « d’écocide ». Une mesure qui pourrait ouvrir aux citoyens le droit de saisir la justice s’ils considèrent qu’un État ne fait pas son travail pour protéger l’environnement et, par extension, leur droit fondamental à vivre sur une planète viable.
(…)« Notre affaire à Tous » a lancé, en novembre dernier, une campagne pour interpeller officiellement l’État par le biais de cinq requêtes : l’inscription du changement climatique dans la Constitution, la reconnaissance du changement climatique comme un crime d’écocide, ouvrir aux citoyens la capacité d’ester en justice, comptabiliser les émissions importées de gaz à effet de serre dans le bilan national et sortir la finance des énergies fossiles. « On peut en tout cas observer qu’il y a un mouvement mondial de justice climatique qui est en train de se fédérer : il y a d’un côté une prise en main des citoyens de leur destin et de l’autre, une forte dynamique autour du droit de la nature. Avec l’idée qu’on ne peut pas avoir un droit efficace par rapports aux enjeux si l’on ne considère pas le vivant dans son ensemble », conclut Valérie Cabanes.
L’actualité africaine et internationale de la semaine, passée en revue avec un invité. Chaque samedi, Pierre-Edouard Deldique revient sur les principaux événements de la semaine en compagnie d’invités, tous observateurs de l’évolution de la planète, en sélectionnant sons et reportages diffusés par la rédaction de RFI durant la semaine écoulée.
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Valérie Cabanes: «Homo natura, en harmonie avec le vivant»
L’actualité africaine et internationale de la semaine, passée en revue avec un invité. Chaque samedi, Pierre-Edouard Deldique revient sur les principaux événements de la semaine en compagnie d’invités, tous observateurs de l’évolution de la planète, en sélectionnant sons et reportages diffusés par la rédaction de RFI durant la semaine écoulée.